Découvrez la gemmothérapie, la médecine des bourgeons!
Apr 09, 2022La Gemmothérapie, une branche de la phytothérapie à découvrir!
Par Véronik Tanguay, Naturopathe, Herboriste-thérapeute accréditée et Aromathérapeute
Communément appelée « médecine des bourgeons », la gemmothérapie fait partie de la grande famille des phytothérapies, lesquelles proposent de prévenir et de traiter une variété de problèmes de santé à l’aide des végétaux.
Les gens pensent souvent que la gemmothérapie utilise les pierres précieuses. Ils n’ont pas tout à fait tort car les deux mots, bourgeon et pierre précieuse, prennent leur racine dans le latin « gemmea ». Tel un minéral, le bourgeon peut paraître sans vie mais est un élément précieux de la nature. D’autres termes proviennent de la même racine latine : le sel tiré des mines s’appelle sel gemme; la résine obtenue par incision du tronc des pins s’appelle le gemmage; l’origine du mot gemmule définit la partie sommitale de l’embryon d’une graine (germe) qui donne naissance à la plantule lors de la germination.
Pour sa part, le mot bourgeons provient de la racine latine « burra, burrio » qui a donné naissance au mot « bourre ». De ce même terme, on vit apparaître les mots bourrages, bourrée, bourrer, bourrelet, etc. Ces mots ont tous une signification de concentration, d’accumulation de matière ou d’énergie brute. Le mot bourgeons convient également la racine de « bourg » qui en bas latin provient de « burgus », signifiant château-fort. Ceci démontre bien l’importance et la priorité de la fonction végétale du bourgeon, celui-ci étant symboliquement associé au château-fort végétal, lieu des trésors bien gardés!
La gemmothérapie est une médecine thérapeutique qui s’inspire des principes du drainage homéopathique. Elle utilise des tissus embryonnaires végétaux en croissance tels que jeunes pousses, bourgeons frais et radicelles, préparés en macération. Les végétaux seront toujours mis en macération frais, sans séchage, hachage ni congélation. Le premier inspirateur de la gemmothérapie a sans doute été Johanne Wolfgant von Goethe avec l’ouvrage fondateur « La métamorphose des plantes ». Malgré l’emploi des bourgeons en médecine naturelle depuis le moyen âge, à l’ère des alchimistes, cette approche thérapeutique fut approfondie par le Dr. Pol Henry (1918-1988), homéopathe bruxellois réputé. Dans les années 1960, il s’inspire des découvertes sur les cellules embryonnaires d’origine animale pour jeter les bases de ce qu’il allait nommer la « phytoembryothérapie ». Il fut le premier à émettre l’hypothèse que le méristème du bourgeon devait contenir toute l’énergie informative au développement des arbres. Cette zone méristématique est composée de cellules indifférenciées qui se multiplient rapidement. In vitro, une seule de ces cellules embryonnaires peut reconstituer le végétal dans sa totalité. Ces cellules ont le potentiel d’évoluer en diverses parties de la plante au cours de sa croissance : branche, feuille, écorce, fleurs, fruits, graines et autres structures végétales. Elles sont donc un concentré d’information qui renferme tout le génie de l’arbre et la puissance de la plante en croissance. Tel que le mentionne le Dr. Pol Henry, la phytoembryothérapie mobilise « les énergies biologiques potentielles » des éléments embryonnaires du végétal. Le médecin établit alors une forme d’extraction propre aux tissus embryonnaires végétaux. Les bourgeons sont mis à macérer dans un mélange eau-alcool-glycérine pendant 21 jours, puis filtrés. La substance obtenue, appelée « macérat-mère », se compare à une teinture-mère, la base des solutions phytothérapeutiques.
Plusieurs autres grands noms contribuèrent à enrichir les connaissances sur la médecine des bourgeons : Jeau-Claude Leunis, Max Tétau, Daniel Scimeca et plus récemment, Philippe Andrianne, Michel Dogna, Christian Escriva, Marcus Greaves et Stéphane Boistard ne sont que quelques partisans écrivains.
Les bourgeons, caméléons de leur environnement
Outre les nombreux travaux de recherche ayant permis de qualifier et de quantifier les nombreuses propriétés médicinales des bourgeons, des travaux récents de recherche sur les arbres ont mis en évidence des fonctionnements qui permettent de mieux comprendre la gemmothérapie.
Comme l’explique Stéphane Boistard: « les arbres ne peuvent pas bouger et vivent dans des conditions climatiques extrêmes et changeantes selon les saisons: froid intense, excès d’eau, sécheresse ou canicule... Afin de survivre, ils ont déployé une capacité d’adaptation. » Il définit les bourgeons comme des capteurs et des régulateurs. À l’ouverture des bourgeons, l’information circule tout au long de l’arbre: les capteurs « interrogent » l’environnement. Ils évaluent le contexte et adaptent la croissance en fonction de ces informations; c’est-à-dire que l’information génétique de l’arbre est modifiée pour assurer la meilleure adaptation au milieu. Avec le même objectif, les bourgeons semblent agir de manière similaire avec le corps humain; ils vont chercher à modifier le programme en cours pour que la personne souffre moins et s’épanouisse durablement, en sachant que cette capacité de régénération est davantage limitée chez l’être humain que chez le végétal. Stéphane Boistard nous partage avec cœur; « la gemmothérapie est une voie transformatrice pour l’humain. Bien que son fonctionnement reste un mystère après cinquante ans d’études, les effets sont là. Mesurables. Observables. Cela agit. »
Le bourgeon, un tout supérieur à la somme de ses parties
Pour toutes ces raisons, la gemmothérapie est parfois qualifiée de « phytothérapie globale ». Toutefois, cette « globalité » ne doit pas être érigée en règle absolue. Le bourgeon ne présenterait pas toujours toutes les propriétés de la plante. La croissance peut également jouer un rôle important, sinon essentiel, dans l’acquisition de certaines propriétés. Par exemple, le bourgeon de framboisier ne possède pas la forte teneur en vitamine C du fruit mûr.
La supériorité de la gemmothérapie sur l’utilisation des parties seules d’une plante se base sur le fait qu’un organisme vivant constitue un tout supérieur à la somme de ses parties. En effet, l’extrait de bourgeon de tilleul possède les propriétés sédatives liées aux fleurs mais également les vertus dépuratives et diurétiques de l’aubier. De plus, on retrouve dans l’extrait de bourgeons de l’aubépine les propriétés du fruit, qui une action sur le muscle cardiaque, mais aussi des fleurs, son action se situant au niveau du rythme cardiaque. Comme nous le partage Christian Escriva dans son livre Précis de phytothérapie, Extraits de Gemmothérapie et de Teintures mères : « Les tissus en pleine croissance sont en outre porteurs d’un principe de rajeunissement, dans l’esprit de l’inventeur de la gemmothérapie; l’un de leurs effets thérapeutiques va être de revitaliser des organes sclérosés. L’action élective sur tel ou tel organe dépendra du principe thérapeutique lié à la plante. »
D’une vision symbolique, la plante toute entière ne représente qu’un déploiement, une réalisation de ce qui repose virtuellement dans le bourgeon ou la graine. Bourgeon ou graine n’ont besoin que des influences extérieures appropriées pour devenir des plantes parfaites. La différence entre le bourgeon et la graine est seulement la suivante :
- La graine a pour terrain immédiat de développement la terre.
- Le bourgeon représente un individu végétal d’espère supérieure ou si l’on veut, un cycle tout entier de formation végétale. Avec chaque bourgeon qui se forme, la plante aborde en quelque sorte un nouveau stade de sa vie; elle se régénère et concentre ses forces pour les redéployer à nouveau.
Ainsi, la formation du bourgeon est en même temps une interruption de la croissance : la vie de la plante peut se concentrer dans le bourgeon quand les conditions d’une vie réelle font défaut, pour se déployer à nouveau quand celles-ci sont réunies. L’interruption de la croissance en hiver repose là-dessus et le redéploiement du printemps est la nouvelle vie.
Les bourgeons, une composition complexe et versatile
Selon la théorie, les bourgeons possèdent certaines propriétés thérapeutiques supérieures à celles des diverses parties de la plante mature. Contrairement à la phytothérapie, les organes utilisés sont en phase de croissance. Ils portent une information dynamique; cette dynamique de régénération sur les tissus est spécifique aux bourgeons et jeunes pousses. D’un point de vue physique, le bourgeon apporte les informations génétiques du végétal (vertu embryonnaire du méristème) ainsi que les propriétés des différentes parties du végétal, comme s’il était à la fois les racines, les tiges, les feuilles, les fleurs et les fruits. Il contient également de fortes concentrations d’éléments actifs comme des acides nucléiques (information génétique), des oligo-éléments, des vitamines, des minéraux, des enzymes, la sève et des hormones de croissances divers dont les auxines et les gibbérellines, hormones qui disparaissent dès la formation de la chlorophylle.
De manière générale, les hormones de croissance agissent comme détoxifiantes, nutritives et rajeunissantes. Elles accélèrent la guérison des plaies et la régénération de la peau. Elles seront utiles lors de tout type de guérison mais aussi lors de la réhabilitation de traumatisme athlétique. Les hormones de croissances améliorent les fonctions rénales et hépatiques, la souplesse et la tonicité de la peau. Elles ont une action positive sur la mémoire, les fonctions cognitives, la vision et le sommeil. Ces bijoux de la nature augmentent également le niveau d’énergie, d’endurance et de capacité physique, dont le début cardiaque, la performance athlétique et la masse musculaire. Elles accroissent le système immunitaire et réduisent l’impact négatif du stress sur les divers organes et systèmes. Les autres composants seront nutritifs, antioxydants et agiront dans le corps selon leurs propriétés individuelles.
Les bourgeons, purifiants et régénérants
Dans la littérature sur la médecine des bourgeons, vous lirez souvent que ces trésors de la nature possèdent une action de détoxification et de drainage. En effet, les remèdes à base de bourgeons jouent un rôle unique en stimulant l’énergie de drainage et d’élimination des toxines de l’organisme. Grâce à la stimulation des organes éliminatoires par les bourgeons, les toxines seront avantageusement éliminées par les organes d’élimination primaire (intestins, reins, peau, poumons, foie) et par les organes d’élimination secondaire (lymphe, estomac, pancréas, muqueuses).
En résumé, la gemmothérapie a pour principales qualités de régénérer des organes affaiblis, drainer des organes engorgés et apporter une meilleure vitalité. En régénérant les organes affaiblis, la gemmothérapie permet de limiter le vieillissement prématuré des organes, de contrer des processus morbides dans le corps et de remédier à des affections aiguës ou chroniques. En drainant les organes, la gemmothérapie aide le corps à limiter les engorgements, les toxines, l’acidité, et participe à plus de fluidité, moins de pollutions internes et à un meilleur fonctionnement des organes. Encore plus, la gemmothérapie :
- Est un concentré de sève brute, très riche en oligoéléments et en minéraux, en glucides, acides aminés, enzymes, antioxydants et hormones de croissance et en vitamines;
- Est formée de méristèmes de cellules souches capables selon les circonstances de régénérer les tissus pour perpétuer le végétal;
- Détoxifie au niveau cellulaire grâce à diverses réactions chimiques pour purifier et nettoyer les cellules;
- Draine certains organes en stimulant l’excrétion des toxines par les liquides organiques dont le sang et la lymphe;
- Stimule les fonctions d’émonctoire de plusieurs organes et glandes;
- Régénère les cellules mourantes;
- Contribue à la réparation de l’ARN;
- Stimule la croissance cellulaire saine par l’action des hormones gibbérellines et des auxines;
- Ralentit le processus de vieillissement en rajeunissant les organes, tissus et cellules.
- Possède une action globale sur le terrain de l’individu, incluant l’aspect combiné des facteurs héréditaires et environnementaux.
- Apporte une meilleure vitalité générale en réduisant la sensibilité aux maladies, virus et bactéries, dynamise nos défenses immunitaires, améliore la santé physique et mentale et procure une forme de jouvence.
Quoi demander de plus? Les bourgeons, un trésor accessible à tous et pour tous!
Les bourgeons sont récoltés lorsqu’ils sont gorgés de sève, c’est-à-dire gonflés mais peu ouverts. Le peuplier baumier, le lilas, l’érable, le bouleau, le saule et bien d’autres nous offrirons leurs bourgeons. Pour leur part, les jeunes pousses sont récoltées au tout début de leur croissance ; les rosacées dont le cassis, le framboisier, le rosier ainsi que le ginkgo et tous les conifères nous offrent de jeunes pousses. Dans le cas de la gemmothérapie, nous ne cherchons pas la chlorophylle mais plutôt les cellules indifférenciées et les hormones de croissance, situées au centre du bourgeon et de la jeune pousse. Ces trésors thérapeutiques seront présents jusqu’à la production de chlorophylle, c’est-à-dire jusqu’à l’ouverture du bourgeon vers la lumière.
Les ratios de macération varient entre 1 :3 à 1 :6. Ainsi, pour 20 grammes de bourgeons frais, vous ajouterez 60 à 120 grammes de votre solvant prêt à l’emploi (eau-glycérine-alcool à 70%). Pour certains bourgeons, il est facile de faire du 1 :3 alors que c’est pratiquement impossible pour d’autres. Comme la récolte doit se faire de manière respectueuse de l’arbre, il n’est pas toujours facile de préparer de grosses quantités de macération. Les bourgeons ne seront ni coupés ni broyés et tremperont dans le solvant pour une durée approximative de 3 semaines.
Le solvant sera composé à part égale d’eau, d’alcool à 70% et de glycérine (33% chaque). Pour l’obtention d’un alcool à 70%, vous pouvez mélanger en quantité égale de l’alcool 94% et de l’alcool 40% ; vous obtiendrez alors un alcool à 68% sans un trop grand casse-tête mathématique ! Un producteur français m’a confié avoir changé la traditionnelle glycérine citée dans la littérature pour du sirop d’agave. Pour ma part, j’utilise souvent le sirop d’érable ou le sirop de bouleau. Quoi de mieux que de faire macérer des bourgeons de bouleau dans son propre sirop ? La présence du sucre dans la macération permet l’extraction des huiles essentielles, des flavonoïdes liposolubles, des vitamines liposolubles et de certains acides. De manière similaire, l’alcool permet aussi l’extraction des alcaloïdes, des hétérosides et des glycosides. Pour sa part, l’eau extrait les dérivés hydrosolubles dont les tanins, les sels minéraux, les flavonoïdes hydrosolubles, les vitamines hydrosolubles et certains acides. Est-ce que ces trois solvants sont absolument nécessaires pour l’extraction des principes actifs et hormones de croissance présents dans les bourgeons ? Est-ce que seule l’alcool et pourquoi pas, l’ajout du vinaigre de cidre de pomme pourrait être suffisant et bénéfique ? Peut-être que oui, peut-être que non… La méthode d’extraction originelle est celle créée par le Docteur Pol Henry en 1959 et des analyses pourraient nous permettre de comparer différents résultats d’extractions selon les solvants utilisés. En attendant l’accessibilité de ces résultats, suivons la tradition ou… explorons ; à vous de décider !
Après la filtration, les bourgeons seront légèrement pressés afin d’extraire le plus possible de macérât-mère. Tout comme les teintures, les macérations de bourgeons se conservent très très longtemps !
La majorité de la littérature proposera des posologies variant de 5 à 20 gouttes de macérât-mère. Ces recommandations seront ajustées par le thérapeute qui tiendra en compte la sensibilité de son client, la pathologie à soigner et la durée du traitement. La meilleure façon de les découvrir est de les essayer sur vous-même ! Pour ma part, je sors maintenant des sentiers battus ; tous les bourgeons sont explorés. Merci les bourgeons de rosiers pour calmer la toux de des enfants, aux bourgeons de schisandra pour avoir soigné des tensions hépatiques instantanément, aux bourgeons de sapin pour la guérison de vertèbres cervicales fracturées chez un diabétique dont la guérison ne progressait pas, aux bourgeons d’aubépine chez les hypertensifs non contrôlés et j’en passe. Mille mercis !
RÉFÉRENCES
ANDRIANE Philippe, Traité de gemmothérapie La thérapeutique par les bourgeons, Éditions Amyris, 2011, 381 pages.
BOISTARD Stéphane, Gemmothérapie Les bourgeons au service de la santé Guide pratique et familial, Éditions Terran, 2016, 253 pages.
ESCRIVA Christian, Précis de phytothérapie, Extrait de Gemmothérapie et Teintures mères, Éditions Promonature, 189 pages, 2008.
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